Par Martina Palazzo
Lorsque l’instabilité et l’insécurité prennent leur quartier dans un pays, les premières victimes sont les habitants en général mais en particulier les enfants, les jeunes et les femmes. Ces menaces récurrentes contre la paix et le développement engendrent une pléthore de conflits autour de questions telles que l’accès et la gestion aux ressources naturelles, les déplacements forcés et massifs, etc.
Comment prévenir ces conflits ? Comment promouvoir la paix, la cohésion sociale et la cohabitation pacifique ? Qu’est ce qui peut être déjà fait au niveau communautaire surtout avec les jeunes ? Quel est le rôle de cette jeunesse demandeuse d’une place dans les différents processus de prise de décision communautaire ?
Toutes les recettes sont bonnes pour faire de la paix non pas un mot mais un comportement. Pour la compagnie ‘Hadre Dounia’’, le théâtre est un véritable canal de sensibilisation et d’interpellation pour une population à majorité analphabète. Ce constat a fait démarrer le moteur d’une caravane de formation et de sensibilisation à travers l’utilisation de l’art théâtral.
Ainsi, 45 jeunes tchadiens et tchadiennes retenus pour leur talent et vivant à N’Djamena ont bénéficié d’une formation sur les techniques du théâtre participatif.
« Le théâtre participatif accompagne le public à une première prise de conscience en vue du changement de comportement, et sans beaucoup de moyens. Sur la scène, s’anime un dialogue entre tous les participants de la pièce, y inclut le public qui se fait acteur » nous explique Hadre Dounia, directeur artistique de la compagnie théâtrale qui porte son nom et par ailleurs responsable de l’activité. Satisfait des progrès techniques et artistiques des jeunes acteurs et actrices, Hadre Dounia est enthousiasmé d’avoir pu atteint une telle participation du public dans tous les arrondissements des villes de N’Djaména et Moundou.
Les performances de ces jeunes ont permis de transmettre des messages clairs et explicites contre le mépris entre les différentes classes sociales, la stigmatisation de certains groupes d’individus de la société, les conflits communautaires.
A travers une catharsis, de la violence au calme, des gestes agressifs aux poignées de mains, les acteurs et les actrices ont mis en scène des cas du quotidien, des histoires de voisinage qui pourraient conduire à conflits ; mais qui peuvent et doivent se résoudre dans la paix et la cohabitation pacifique dans le quartier, la communauté. Car ne dit-on pas que « ton voisin est le premier parent en cas de besoin » (phrase prise de la pièce théâtrale). Les toutes récentes inondations, qui ont touché 30 000 ménages à l’échelle du pays, ont montré comment grâce à la solidarité et l’entraide des personnes sinistrées après une nuit de grosse pluie, ont pu être secourues par la communauté.
Les appels à la prévention des conflits et à la consolidation de la paix se font de plus en plus pressants et inéluctables à un moment historique où les vulnérabilités sociales se mêlent à la pandémie globale de la COVID-19. D’où la volonté des 45 jeunes acteurs et actrices à sensibiliser également sur les mesures barrières contre la propagation du coronavirus, sur les conséquences négatives de la stigmatisation des malades et sur l’importance de protéger les mineurs, les femmes et les plus vulnérables aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des ménages.
A la fin du spectacle, les jeunes artistes ont distribué du savon et de l’eau de javel au public pour contraster la propagation du coronavirus. © UNICEF CHAD/2020/Palazzo
« Ce qui m’a frappé le plus aujourd’hui est d’avoir vu la jeunesse sensibiliser les adultes et les personnes du 3e âge. C’est notre jeunesse, concrète et active, qui nous sollicite à faire de notre pays un endroit de paix », témoigne Yamadje Sotinan, spectateur et fonctionnaire de la commune du 9e arrondissement.
C’est dans cet esprit que la caravane continuera son chemin dans la ville de Bol au mois de novembre 2020, tout en gardant l’enthousiasme dont elle a fait preuve jusqu’à présent.
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Cette activité est soutenue par l’UNICEF Tchad grâce à l’appui financier du Fond des Nations Unies pour la consolidation de la paix. Elle s’inscrit dans un large programme de trois ans sous le titre « Appui à la participation citoyenne des jeunes et des femmes à la gouvernance locale et à la consolidation de la paix au Tchad ».