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Dilemme entre survie et dignité

par Nancy Ndal-lah

« Orpheline de père, je n’ai jamais été à l’école. A 16 ans, j’ai été forcée à me marier à un homme plus âgé que moi. Lorsque ma mère a réclamé ma dote, 9 mois plus tard, mon mari a refusé de s’en acquitter. Les autorités traditionnelles ont alors prononcé notre divorce.  Ensuite, j’ai contracté un second mariage qui n’a pas fait long feu et je me suis retrouvée une fois de plus divorcée, abandonnée et ne sachant que faire. A la mort de ma mère, j’avais 18 ans et une fille de 3 ans à ma charge. Voilà comment je me suis retrouvée dans le commerce du sexe à contre cœur. »

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Achta, après une séance de causerie éducative à la Maison de culture d’Abéché. © UNICEF CHAD/2019/Ndal-lah

Cela fait bientôt 15 minutes qu’Achta (nom fictif pour taire son identité) nous raconte son histoire dans un coin de la maison de la culture d’Abéché, loin des regards indiscrets. Agée de 28 ans aujourd’hui, le regard froid et désespéré, elle reprend son discours : « Heureusement que j’ai participé à cette séance qui m’a permis de me dépister et de commencer le traitement ARV comme suis séropositive. » Les séances d’information et de counseling dont parle Achta sont organisées par la maison de la culture Ahmat Pecos d’Abéché avec l’appui de l’UNICEF. Ces moments représentent des opportunités pour repérer, dépister et traiter les jeunes et adolescents.

Cette année, la Journée mondiale de lutte contre le sida 2019 est célébrée sous le thème : « Les organisations communautaires font la différence. » Une occasion de mettre en avant le rôle primordial joué par les organisations communautaires.

A Abéché, ville située à 900 Km à l’Est du Tchad, plusieurs jeunes et adolescent(e)s comme Achta, vivent dans les maisons closes et sont exposé(e)s au commerce du sexe. Dans un contexte dominé par l’exclusion, ils exercent leur activité dans la discrétion et sont exposé(e)s davantage au risque de contamination des maladies sexuellement transmissibles dont le VIH/Sida. Faible capacité à négocier des relations sexuelles protégées et parfois en manque de préservatifs, le risque est d’autant plus élevé pour ces dernier(e)s.

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Réunion de coordination des pairs éducateurs travaillant chaque semaine avec des groupes de jeunes et adolescents sur la prévention du VIH/Sida.  © UNICEF Chad/2019/Ndal-lah

La discrimination et la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH font toujours tâche d’huile dans la riposte au VIH. Achta, ayant été dépistée auparavant dans le cadre des consultations prénatales, n’a pas réussi à poursuivre son traitement par peur de rejet. A présent, il n’est plus question pour elle d’arrêter son traitement : « Cette fois, je prends correctement mon traitement parce que j’ai enfin compris que ma survie dépend largement de la prise régulière des ARV. Au cours des séances de causeries éducatives j’ai aussi appris à exiger le port obligatoire du préservatif. ».

 « Cette activité me permet de prendre en charge mes enfants. Mais j’espère quitter un jour car ma fille de 13 ans habite avec moi. Je ne suis pas fière de l’exemple que je lui transmets. J’espère une vie différente pour elle que celle de ma mère et de la mienne ».

Jusqu’au 3ème trimestre 2019, 944 pairs éducateurs ont été formés, 424 340 jeunes et adolescents sensibilisés, 310 631 orientés, 141 238 dépistés et 635 jeunes séropositifs mis sous traitement ARV, à travers 27 structures culturelles du Tchad (Maisons de Jeunes, Maisons de Quartiers, Maisons de Cultures). Grâce au financement du Fonds Mondial, l’UNICEF appuie le Ministère de la Culture, du tourisme et de l’Artisanat à travers le Programme CLAC (Centre de Lecture et d’Animation Culturel) pour la prévention du VIH/Sida en milieu jeune et adolescent ciblant les plus vulnérables. En se basant sur la carte de vulnérabilité avec un accent particulier sur les filles, ces interventions allient la paire éducation, les activités de communication de masse, de proximité, le dépistage volontaire, l’accès au traitement, le suivi et l’appui psychosocial.

VIH/SIDA: les vies d’enfants et adolescents toujours menacées dans le monde et au Tchad – UNICEF

NEW YORK/JOHANNESBOURG/N’Djamena, le 30 novembre 2017 – En 2016, au niveau global le sida coûtait la vie à 120 000 enfants de moins de 14 ans et contaminait 18 enfants chaque heure. Si la tendance actuelle se poursuit, 3,5 millions d’adolescents seront nouvellement infectés d’ici à 2030, d’après les projections du rapport 2017 de l’UNICEF Les enfants et le sida : Mise à jour statistique 2017 publié aujourd’hui.

« Il est inacceptable qu’autant d’enfants continuent de mourir du sida et que si peu de progrès soient réalisés pour empêcher les adolescents de contracter le VIH », déclare le Dr Chewe Luo, Chef de la section VIH/sida au sein de l’UNICEF. « L’épidémie de sida est loin d’être terminée et menace encore et toujours la vie d’enfants et de jeunes. Des actions supplémentaires doivent absolument être entreprises pour éviter ce fléau. »

Et pour cause, une analyse de l’UNICEF des tendances démographiques et des nouvelles données relatives au VIH révèle que les objectifs fixés au sein du cadre « Start Free, Stay Free, AIDS free », élaboré en 2016 pour accélérer l’action en vue de mettre fin au sida chez les enfants d’ici à 2020, ne seront pas atteints.

Des avancées ont néanmoins été réalisées en matière de lutte contre le sida, notamment dans le domaine de la prévention de la transmission mère-enfant, lesquelles ont permis d’éviter quelque deux millions de nouveaux cas d’infections par le VIH chez les enfants depuis 2000. Toutefois, l’UNICEF rappelle qu’il est impératif de ne pas baisser la garde pour autant. Comme le souligne l’organisation dans sa mise à jour statistique, en comparaison avec les autres groupes d’âge, les enfants âgés de 0 à 4 ans vivant avec le VIH sont les plus exposés au risque de décès imputable au sida.

Mais la situation de la prise en charge pédiatrique du VIH& SIDA reste très préoccupante en Afrique et en particulier au Tchad. La peur de la discrimination et la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH et le sida, la faiblesse en termes d’information correcte des populations et les mythes qui entourent la maladie et la résistance des hommes/maris au dépistage de leurs femmes par peur d’exposition de leur propre statut sérologique par exemple sont autant de freins à l’éradication de la mortalité maternelle, néonatale et infantile due au VIH.

« Nous ne pouvons pas nous permettre de relâcher nos efforts. La prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant reste une priorité absolue de nos programmes, et nous mettons tout en place avec nos partenaires pour atteindre nos objectifs », indique Philippe Barragne-Bigot, représentant de l’UNICEF au Tchad.

En effet, le Tchad fait partie des 22 pays dits prioritaires dans lesquels des plans d’accélération de la riposte ont été mis en œuvre[1]:

  • Une campagne de dépistage communautaire animée par le Réseau National des Personnes vivant avec le VIH et le sida a permis de dépister 1944 enfants de 1 à 14 ans cette année DONT 41 vivant avec le VIH sont mis sous traitement ARV.
  • Le dépistage des enfants est en cours d’introduction dans toutes les portes d’entrée de services des grands hôpitaux (hôpital Mère-enfant, Hôpital général de référence, Hôpital régional de Moundou) : hospitalisation, consultation et nutrition
  • Le dépistage des enfants de moins de 5 ans a été intégré dans des centres nutritionnels ambulatoires et thérapeutiques dans les 3 régions sahéliennes et a permis de dépister 4913 enfants malnutris, dont 30 VIH+ sous traitement ARV,
  • 149,587 adolescents ont été dépistés et 693 qui se sont retrouvés séropositifs sont sous traitement aux antirétroviraux ; la couverture prophylactique des enfants reste de 46% alors que celle de leurs mamans atteint 72%

De plus, d’importants efforts ont été consentis par l’Etat, la communauté et les partenaires pour améliorer l’accès des personnes infectées au traitement antirétroviral : les traitements antirétroviraux sont gratuits depuis 2007, et l’accès au financement du Fonds Mondial pour la Lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme depuis 2003 a grandement contribué à l’amélioration de la riposte à l’épidémie.

Plus que jamais, l’UNICEF est convaincu que l’épidémie du sida doit rester une préoccupation mondiale de santé publique. Des solutions innovantes doivent être adoptées pour accélérer les progrès en matière de prévention du VIH chez les enfants et garantir que ceux vivant avec le virus reçoivent un traitement adéquat.

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Notes aux rédactions :

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Le rapport Les enfants et le sida : Mise à jour statistique 2017 est disponible à l’adresse suivante : http://uni.cf/worldaidsday

Pour plus d’informations, veuillez consulter le site : www.childrenandaids.org

À propos de l’UNICEF
L’UNICEF travaille dans certains des endroits les plus inhospitaliers du monde pour atteindre les enfants les plus défavorisés. Dans 190 pays et territoires, nous travaillons pour chaque enfant, chaque jour, partout, afin de construire un monde meilleur pour tous.

Pour plus d’informations sur l’UNICEF et son travail : http://www.unicef.org/fr

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Pour plus d’informations, veuillez contacter :

Cindy Thai Thien Nghia, C4D Specialist, [email protected]

 

A Moundou, une jeunesse pleine d’espoir

Par Davy Takendjilembaye

« Avoir le VIH n’est pas une fin en soi. Ces enfants veulent aller à l’école, ils ont les mêmes droits que les autres enfants. » Ousmang Prudence, une jeune fille dynamique et engagée, est une des animatrices du club des adolescents du Centre Djenandoum Naasson de Moundou. « J’essaye d’aider ces jeunes à vivre positivement avec leur maladie » raconte-t-elle.

La ville de Moundou est connue pour bien des choses, un climat plutôt clément, une économie dynamique, mais elle est aussi une des villes les plus touchées par le VIH et le Sida. Au niveau national, le taux de séroprévalence au VIH est de 2,5%. A Moundou, le taux est plus de deux fois plus élevé (6,4% pour la région).

Pour les adolescents de Moundou, le Centre Djénandoum Naasson (CDN) est un second souffle, un espoir de vie. Ce centre améliore le suivi et la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH et le Sida aux différents stades de la maladie, en minimisant les effets néfastes. On y organise des dépistages volontaires gratuits ainsi que la prise en charge globale des adultes et des enfants séropositifs.

« Comme tous les autres enfants, j’ai le droit d’aller à l’école et de rester en bonne santé. Je fréquente le club des ados depuis des années. J’y viens régulièrement pour prendre mon traitement et réviser mes leçons. » Jean* a 9 ans, et même s’il est né avec le VIH, il a confiance en l’avenir.

Vivre son adolescence avec le VIH n’est pas chose facile, surtout dans une ville où l’accès à des soins de qualité n’est pas toujours évident, malgré la mise à disposition gratuite des antirétroviraux par le Gouvernement.

Le VIH et le Sida n’affectent pas seulement la santé des enfants et des adolescents, c’est toute leur vie sociale qui se trouve bouleversée notamment à cause de la stigmatisation dont ils sont victimes. Pour les soulager, le Centre Djenandoum Naasson a aussi mis sur pied un Club des Jeunes Adolescents pour organiser des séances de causeries éducatives et des orientations pratiques sur toutes les questions liées à la vie de ces jeunes.

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Bénédicte, une des nombreuses animatrices du Club des Adolescents

« Je me sens à l’aise ici. On nous donne de bons conseils pour mieux vivre notre adolescence et notre puberté. Je rêve de devenir médecin pour sauver des vies mais je sais que dois sérieusement étudier pour y arriver, » raconte Remadji, une jeune membre active du club des ados du Centre Djénandoum Naasson, un havre de paix pour cette jeune fille plein de vie.

Dougsoum Oueina est aussi un animateur. Touché par le destin de ces enfants, il a décidé de s’engager à leurs côtés : « La plupart sont orphelins de père et de mère. Ils sont souvent stigmatisés par leurs camarades de classe. Je suis tellement admiratif de leur courage. Ils nous surprennent tous les jours par leur curiosité et leur détermination. Mon rôle, c’est de les aider à réussir dans la vie ! »

Le Centre Djénandoum Naasson existe depuis 2005. Depuis 2009, l’UNICEF vient en appui au centre dans la prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH et le Sida. L’UNICEF soutient l’organisation d’activités de prévention en milieu jeune et met à disposition des intrants pour le dépistage et la prise en charge médicale. L’UNICEF appui aussi le soutien scolaire et psychosocial de ces adolescents.

* Les noms des jeunes ont été changés